Préface
John Dowland a
été un des rares compositeurs anglais de son époque dont la gloire
se soit étendue à travers l’Europe. Bien que sa musique ait été
presque complètement ignorée durant le XVIIIè siècle et
la majeure partie du XIXè, il n'a jamais été entièrement
oublié.
Le début du XXè siècle voit l’exceptionnelle qualité de
son œuvre commencer à être reconnue par les érudits et les
spécialistes.
Vers 1920 déjà, l'édition de ses livres de chants par Dr. E. H.
FELLOWES, a permis que sa réputation de compositeur soit bien
établie. Mais il a fallu attendre le renouveau du luth et la
reconnaissance de son importance comme instrument soliste pour qu’on
puisse entendre la musique de Dowland pour luth seul en dehors du
petit cercle des amateurs de musique ancienne.
Ecriture
Un siècle avant J.S. BACH, John DOWLAND témoigne d’une générosité et
d’une maîtrise rare de l’écriture musicale et de son émotion.
L’observation de l’ensemble de son œuvre met en lumière des
constantes d’écritures qui permettront de dégager des constantes
techniques.
L’écriture de DOWLAND s’appuie sur quatre points principaux :
- Une structure harmonique, généralement simple, avec modulations
- Une mélodie, qui se tient le plus souvent à l’aigu
- Un contrepoint, préfigurant le style fugué
- Des variations, souvent en gammes, explorant en général fidèlement
la structure harmonique
L’œuvre se décompose en plusieurs groupes aux caractères musicaux
différents : Fantaisies, Pavanes, Gaillardes, Allemandes, Gigues,
Courantes, Voltes, Chansons et Ballades.
Caractère et Interprétation
Dansante, triomphale, mélancolique ou narrative, la musique de
DOWLAND se conçoit dans la clarté et la simplicité.
La ligne mélodique sera toujours limpide, le contrepoint au deuxième
plan, le tout sur une structure de basses très affirmée.
Le caractère et l’interprétation se préciseront de par
l’appartenance des oeuvres à l’un des groupes et par ce qu’il faudra
en déduire.
Technique
Il est bien sûr inutile d’essayer d’imiter la technique luthistique
lorsque l’on est guitariste. Il convient cependant d’en dégager les
caractéristiques afin de reproduire celles-ci avec les meilleurs
moyens autorisés par la guitare.
Si la technique de la main gauche est très proche, celle de la main
droite diffère sur bien des points.
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Petit doigt posé sur la table du luth, dans un souci de stabiliser
la main
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Attaque généralement sans ongle
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Alternance index-pouce souvent utilisée dans les gammes
·
Son clair
·
Peu ou pas de liaisons
Le
guitariste aura donc à développer les points suivants :
- Stabilité de la main droite (pouce sur une corde ?)
- Précision et clarté dans les gammes
- Maîtrise de la polyphonie. Le contrôle des voix sera déterminant
dans l’interprétation.
Certains luthistes, comme certains guitaristes, ont travaillé le
contrôle des basses par le pouce. Ceci sera toujours, toutes
musiques confondues, un élément clarificateur du discours
instrumental. |
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Un
certain nombre de compositions pour luth de Dowland ont alors été
éditées, mais beaucoup sont longtemps restées ensevelies dans
l'obscurité des manuscrits originaux et de nombreuses oeuvres de
qualité ne sont pas encore portées au catalogue général.
Grâce à l’excellent travail de collecte réalisé par Diana Poulton et
Basil LAM, j’ai pu faire ces transcriptions avec un maximum
d’exactitude. L’observation de l’ensemble de l’oeuvre instrumentale
de John DOWLAND m’a permis de mettre en évidence l’existence de
trois niveaux nettement différenciés d’écriture et de difficulté
technique. Ces trois volumes sont la concrétisation de cette
observation, la sélection s’étant faite sur les plus belles pièces
dans chacun des niveaux.
Transcription
L’écriture contrapuntique a ses exigences. La restitution de
plusieurs voix en respectant leur conduit pose parfois des problèmes
au transcripteur.
Dans un souci de pragmatisme instrumental, la valeur théorique de
certaines notes que l’on ne peut tenir a été écrite en valeur
réelle.
Les doigtés ont été réalisés pour aider au maximum la lecture et
l’apprentissage des pièces. Si plusieurs solutions sont possibles,
la préférée est notée dans la continuité des doigtés des notes
précédentes.
Dans la notation des positions de barrés de la main gauche en
chiffres romains, les chiffres en position d’exposant qui les
accompagnent parfois indiquent le nombre de cordes qu’il est
nécessaire de barrer. Lorsqu’il s’agit d’un petit i en position
d’indice, cela suggère de réaliser un barré sur les trois ou quatre
cordes intérieures.
Enfin, il existe plusieurs versions de certaines pièces. Le choix de
la version transcrite s’est toujours porté sur la plus aboutie.
Il
est possible de retrouver le timbre du luth en positionnant un
capodastre à la troisième case, afin de retrouver l’accord de
l’époque. (En fait, le diapason ayant évolué, un positionnement à la
deuxième case serait suffisant). Cette action donnera un timbre et
une clarté qui rappelleront le luth.
La plupart des pièces ont été transcrites avec la troisième corde en
Fa#, retrouvant en cela l’accord du luth renaissance. Pourtant, dans
les tons de La, Ré ou Do, j’ai souvent préféré l’accord original de
la guitare qui convient mieux aux positions naturelles de ces
tonalités.
J’insisterai ici sur la nécessité de poser une réflexion sur la
technique des liaisons instrumentales, que je distinguerai des
liaisons musicales. Si musicalement, elles sont utilisées pour
articuler certaines phrases, techniquement, elles masquent souvent
les carences du guitariste dans les gammes. Forcées, peu contrôlées
dans leur définition, les liaisons sont parfois prétexte à des
déplacements sur une même corde pour reproduire une articulation,
sans considération du fait qu’une corde raccourcie est appauvrie en
harmoniques, donc en clarté.
Plutôt que de réaliser une liaison, il m’apparaît davantage
nécessaire de conserver les idées qu’elle suggère, c’est-à-dire de
jouer legato et articulé. N’ayant pas d’archet pour définir
les notes liées d’une manière relativement égale, le guitariste,
comme d’autres instrumentistes à clavier qui ne disposent pas des
liaisons guitaristiques, saura accentuer avec contrôle une note
d’articulation, développera un jeu précis, coordonné, exprimant
legato ou staccato et n’utilisera qu’avec précaution et
jugement l’emploi d’une liaison.
Dans ces transcriptions, les quelques liaisons marquées en pointillé
sont celles que l’on peut envisager techniquement comme aide à la
main droite. Certaines réunissent deux notes de même hauteur,
généralement des basses, qui m’ont paru devoir être liées bien
qu’elles ne le soient pas dans le texte original. |
Sources
" THE
COLLECTED MUSIC OF JOHN DOWLAND " de Diana POULTON et Basil LAM,
chez FABER MUSIC LIMITED à LONDRES a été l’ouvrage de référence qui
m’a permis de réaliser ces transcriptions. Je renouvelle mes
remerciements aux auteurs pour la précision et le sérieux de leur
travail.
La
vie de John Dowland
·
1563 : Naissance de John DOWLAND
·
1580 : Il se rend à Paris au service de Sir Henry Cobham,
Ambassadeur à la Cour du Roi de France Henri III.
·
1586 : retourne probablement en Angleterre durant cette année.
·
1588 : est mentionné par Dr. John Case parmi les musiciens les plus
célèbres de son temps dans Apologia Musices.
·
1594 : Sa demande de poste à la cour étant rejetée, il quitte
l’Angleterre avec un permis de voyager à l'étranger délivré par Sir
Robert Cecil et le Comte d’Essex. Il rend visite au Duc de Brunswick
et au Landgrave de Hesse, puis voyage vers le sud avec l'intention
de visiter Luca Marenzio à Rome. Il joue devant le Grand Duc de
Toscane à Florence, mais quitte la ville précipitamment quand des
catholiques anglais exilés essaient de l'impliquer dans un complot
contre la Reine. Il retourne en Allemagne.
·
1596 : Revient parfois à la Cour du Landgrave de Hesse durant cette
année. Sept de ses compositions paraissent dans " The Barley’s
New Booke of Tabliture " sans sa permission. Il les qualifie de
" faux et imparfaits ".
·
1597 : " The First Booke of Songes " entre au Registre de
l’Imprimerie Nationale. Dowland s’y décrit lui-même sur la page de
garde comme "Bacheler of Musicke in both the Universities".
·
1598, 9 février : se voit offert un poste à la cour du Langrave de
Hesse.
6 juillet : se rend à la Cour de Christian IV du Danemark.
18 novembre : commence ses devoirs de luthiste royal à la Cour
danoise avec un excellent salaire, dont le montant inhabituel est
attribué à son génie par Francis Meres dans Palladis Tamia.
·
1600, 15 juillet : " The Second Booke of Songes " entre au Registre
de l’Imprimerie Nationale. John DOWLAND revient en Angleterre durant
cette partie de l'année acheter des instruments et engager d’autres
musiciens pour la Cour Danoise. Réimpression du " First Booke of
Songes ".
·
1601, 6 juin : le Roi danois lui offre un portrait de Sa
Majesté Royale en or massif.
·
1602-3 : semble vivre surtout en Angleterre
·
1603 : " The Third and Last Booke of Songes " entre au
Registre de l’Imprimerie Nationale. Deuxième réimpression du
" First Booke of Songes ".
·
1604 : " Lachrimae or Seaven Teares " entre au Registre de
l’Imprimerie Nationale. Semble être revenu au Danemark pour toucher
des arriérés de salaire.
·
1605 : John DOWLAND est assailli toute l’année par des problèmes
d'argent.
·
1606, 10 mars : il est congédié de la Cour de Danemark en
l’absence du Roi en visite au Duc de Brunswick. Troisième
réimpression du " First Booke of Songes "
·
1608 : Quatrième réimpression du " First
Booke of Songes ".
·
1610 : Le " Varietie of Lute-Lessons " est imprimé. Il
contient neuf morceaux de Dowland avec une traduction des
" Observations nécessaires sur le jeu du luth " par Besardus, et les
propres " Autres Observations Nécessaires sur le Luth " de Dowland.
·
1611, 28 octobre: DOWLAND est maintenant luthiste de Lord Walden en
Angleterre.
·
1614, 14 février : Joue durant les festivités du mariage de la
Princesse Elizabeth. Robert Johnson reçoit £45 pour écrire les
chansons et la musique, Dowland est payé £2 pour jouer.
·
1614 : Pour la première fois, il est appelé Dr. John Dowland.
·
1624 : Dowland est cité avec Byrd, Bull, Morley et "le reste de nos
artistes rares", par William Webb dans un poème appartenant au
"Francis Pilkington's Second Set of Madrigals ".
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1626, 20 janvier : Reçoit son dernier salaire. Son fils Robert le
remplace à son poste à la cour.
20 février : Décès. La mention "John Dowland, Docteur of Musicke"
est portée sur le Registre des Décès de St. Anne, Blackfriars. |